L'étalon de
transfert

« L'étalon est la réalisation de la définition d’une grandeur donnée, avec une valeur déterminée et une incertitude de mesure associée, utilisée comme référence. »

VIM


Pour que les industriels puissent accroitre la qualité et la confiance de leurs mesures industrielles à l’échelle du nanomètre, ils vont devoir étalonner leurs instruments grâce à des étalons de transfert. Le mAFM du LNE a donc pour mission de définir une référence de mesure à l’échelle du nanomètre intégrée dans un matériau de haute qualité métrologique nommé étalon de transfert. Il aura pour but par la suite d’être utilisé comme référence pour divers laboratoires et industries afin qu’ils puissent contrôler leurs mesures matérialisées ou leurs appareils de mesure. La traçabilité de leurs mesures leur est importante car elle donne la confiance et l’assurance que leurs résultats de mesure sont conformes aux diverses normes nationales ou internationales. Ce procédé est particulièrement utilisé par exemple dans les industries spécialisés dans la micro-électronique, dans l’industrie de l’automobile, les laboratoires équipés d’AFM tels que Thales, Synchrotron Soleil, Bruker. Mais aussi les prestataires de service d’imagerie liés au nanoparticules, notamment lorsqu’il est question dans le domaine de la santé et de l’environnement.

A l’échelle du nanomètre, et plus particulièrement dans le domaine de la microscopie à champ proche, les étalons de transfert renferment des propriétés dimensionnelles qui prennent généralement la forme d’un échantillon en silicium dans lesquels sont gravés des structures périodiques ou d’un échantillon où sont déposées des nanoparticules de référence sphériques [1].

Dans le cas des structures périodiques, elles prennent la forme de réseau unidimensionnel ou bidimensionnel (figure 1) [2,3]. Les réseaux étalons sont créés par des laboratoires accrédités aux normes ISO/IEC. Les procédés de construction de ces échantillons permettent de maîtriser l’homogénéité des dimensions des motifs gravés et de procurer de très bonnes qualités métrologiques. Par ailleurs, ces réseaux étalons permettent de réduire le temps de mesure et de minimiser le risque de détériorer la pointe.


Figure 1 - Exemples d’étalons de transfert en forme de réseau bidimensionnel et unidimensionnel (illustrés par modélisation avec Matlab).

Ces types de réseaux sont étalonnés de manière à obtenir dans un premier temps le pas de réseaux moyen défini par la distance entre chaque motif. Puis dans un second temps la hauteur de marche du réseau. Les mesures sur ces étalons sont généralement prises à partir de l’ISO 5436 − 1 : 2000 [4], définies par les zones A, B et C illustrées sur le profil de la figure 2. Les valeurs du pas de réseau et de la hauteur de marche sont ensuite enregistrées dans un certificat d’étalonnage et sont accompagnées d’une incertitude de mesure qui permet de définir leur taux de confiance. Finalement, ces valeurs délivrées serviront de référence pour les futurs instruments industriels afin qu’ils puissent étalonner les déplacements de leur instrument dans la direction XY (pas de réseau) et dans la direction Z (hauteur de marche).


Figure 2 - Définition de la hauteur de marche dans un réseau étalon défini par l’ISO 5436. L est la largeur du pas et h la hauteur prise sur les zones L/3 du réseau étalon.

Actuellement, le LNE met en place au niveau national deux types de réseaux étalons (figure 3), élaborés par le laboratoire de métrologie du LPN (Royaume-Uni). Les propriétés dimensionnelles de ces réseaux étalons sont définies par un pas bidimensionnel de 900 nm et d’une hauteur de marche de 60 nm pour le premier, et par un pas de 140 nm et d’une hauteur de marche de 20 nm pour le second. Notre AFM virtuel exploitera essentiellement les caractéristiques des étalons du LNE.


Figure 3 - Images réalisées au microscope électronique à balayage d’un réseau étalon du LNE. Le pas du réseau bidimensionnel est de 900 nm et la hauteur de marche de 60 nm.

Ces étalons de transfert sont souvent utilisés dans des comparaisons internationales entre les laboratoires nationaux de métrologie pour vérifier la performance de leur AFM métrologique [5-7]. En effet, les résultats d’une intercomparaison permettent d’illustrer l’importance d’étalonner les instruments à partir de valeurs de référence introduites dans un étalon de transfert. Le LNE a mis en place une intercomparaison autour de la mesure de caractéristiques dimensionnelles de réseaux étalon par microscopie à force atomique (AFM) et par microscope électronique à balayage (MEB). 26 laboratoires industriels et académiques ont participé à cette intercomparaison. La figure 4 présente les résultats des mesures effectuées au MEB de chaque participant d’un échantillon de réseaux 2D. Dans un premier temps, aucun des participants n’a étalonné son instrument (figure de gauche), aucun appareil n’est donc directement lié à la traçabilité du mètre SI. Par conséquent les valeurs fournies par les participants sont très dispersées puisqu’ils ne s’appuient sur aucune référence à l’échelle nanométrique. Néanmoins, lorsque les participant étalonnent leur instrument à partir d’un étalon de transfert (fourni par le LNE à cette occasion) avec un certificat d’étalonnage délivré, ces mêmes mesures sur le réseaux 2D deviennent beaucoup moins dispersées (figure de droite) et sont toutes liées à la traçabilité du mètre SI. Finalement, cet exemple de résultats d’intercomparaison réalisés par le LNE montre l’importance d’étalonner les instruments à partir d’un étalon de transfert bien caractérisé. Le certificat d’étalonnage contient ainsi les résultats de mesure, associées à une incertitude de mesure et une spécification métrologique identifiée. En l’absence de telles indications, les résultats de mesure ne peuvent pas être comparés soit entre eux, soit par rapport à ces valeurs de référence données dans cette spécification.


Figure 4 - Résultats de l’intercomparaison organisée par le LNE sur un échantillon en réseau 2D. Les mesures réalisées sur l’échantillon ont été faites avant et après étalonnage des MEB des 26 laboratoires participants. Les résultats donnés sont les écarts entre les valeurs mesurées par les 26 participants et la valeur mesurée par le LNE.

Ces étalons de transfert sont donc des références pour les industriels et laboratoires d’essai afin qu’ils puissent étalonner leurs propres instruments de mesure (microscope à champ proche, microscope à force atomique, microscope électronique à balayage, etc). Ils pourront ainsi effectuer leurs mesures sur divers échantillons et obtenir des résultats qui seront directement liés à la traçabilité du mètre SI. Cependant, pour que les étalons soient opérationnels, leurs propriétés dimensionnelles doivent être raccordées au mètre SI. Pour cela, les étalons vont être étalonnés par un instrument de référence. Ce dernier délivrera un certificat d’étalonnage contenant ainsi les résultats de mesure, y compris l’incertitude de mesure et une déclaration de conformité avec une spécification métrologique identifiée. Cette partie est importante car la course à la précision et la qualité de caractérisation d’un étalon devient un enjeu mondial. L’instrument de référence qui assure cet enjeu au niveau national est le microscope à force atomique métrologique du LNE.


[1] : LGC 2012 Certificate of analysis ERM - FD304
[2] : Ducourtieux S and Poyet B 2011 Development of a metrological atomic force microscope with minimized abbe error and differential interferometer-based real-time position control Measurement Science and Technology 22 094010
[3] : Dai G, Koenders L, Pohlenz F, Dziomba T and Danzebrink H U 2005 Accurate and traceable calibration of one-dimensional gratings Measurement Science and Technology 16 1241–1249
[4] : 5436 I 2000 Spécification géométrique des produits (gps) – État de surface : Méthode du profil ; Étalons – partie 1 : Mesures matérialisées International Organization for Standardization 5436-1:2000 1241–1249
[5] : Breil R, Fries T, Garnaes J, Haycocks J, Hüser D, Joergensen J, Kautek W, Koenders L, Kofod N, Koops K, Korntner R, Lindner B, Mirandé W, Neubauer A, Peltonen J, Picotto G, Pisani M, Rothe H, Sahre M, Stedman M and Wilkening G 2002 Intercomparison of scanning probe microscopesPrecision Engineering 26 296–305
[6] : Koenders L, Bergmans R, Garnaes J, Haycocks J, Korolev N, Kurosawa T, Meli F, Park B C, Peng G S, Picotto G B, Prieto E, Gao S, Smereczynska B, Vorburger T and Wilkening G 2003 Comparison on nanometrology : Nano 2—step height Metrologia 4004001–04001
[7] : DFM 2008 Nano5 - 2d grating Final report 1107-07 JG

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